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14 janvier 2020

La fabuleuse histoire du blason de Chéu - Episode 1



Le blason officiel depuis 2012


Dans cet article de l'Yonne Républicaine du 23 février 2012, le maire de Chéu explique comment le blason du village a pris forme et vie en 2011/2012. Il précise  bien que rien n'a été laissé au hasard et que ce blason répond aux règles de l'héraldique.
Très bien. Nous pouvons faire confiance aux services départementaux spécialisés dans ce domaine.
Par contre, quel étonnement d'apprendre que notre village se trouve en Champagne pouilleuse (un qualificatif d'ailleurs désuet, remplacé depuis belle lurette par Champagne crayeuse). 
Chéu se trouve en réalité en Champagne humide.

Rien de tel qu'une petite carte pour s'y retrouver.


Le périmètre de la Champagne Humide (en rouge). 



Saint-florentin se situe à la confluence de l'Armançon et de l'Armance, ceci depuis toujours même si cette confluence a été modifiée lors de la construction du canal de Bourgogne.
La Champagne crayeuse se situe au nord de la zone en bleue qui, elle, représente la Champagne humide.

Voir aussi l'atlas des paysages de l'Yonne, page 50-52.

Bref. Disons que le maire, à vouloir faire l'érudit, s'est doublement mélangé les pinceaux.

Rappelons que le Florentinois, après avoir été Bourguignon,  passa dans les mains des Champenois en 936 pour revenir dans celles des Bourguignons en 1420 avant d'être  finalement, et après de nombreuses "péripéties", intégré en 1790 au département de l'Yonne tel qu'on le connaît (ou presque) aujourd'hui. Par contre, d'un point de vue religieux, le Florentinois resta toujours attaché au diocèse de Sens pendant toutes ces périodes.
Ceci pour faire simple, ce chapitre de cette histoire locale n'étant pas le sujet de cet article.

Revenons au blason !

Dans l'article du journal, le nom de la famille d'Ailly est évoqué, sans plus ! Pas de prénom, pas de date, ... juste un nom que l'on pourrait croire sorti d'un chapeau.
Pourquoi si peu de détails ? Pourquoi si peu d'éloquence des élus qui semblent si férus d'histoire ? Pourquoi ne pas avoir partagé ce savoir avec les citoyens ?
Cela nous interroge.

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Grattons donc un peu :

A défaut d'explications sur les recherches effectuées, imaginons leur parcours !
Ont-ils débuté leurs recherches en consultant "l'Armorial historique de l'Yonne, recueil des armoiries portées avant 1789 ..." par Aristide DEY, publié en 1862 ?
Nous pouvons le penser puisque en page 29, surgit le nom d'Ailly, ... sans prénom.


Extrait de l'Armorial de l'Yonne page 29


Une information reprise dans le Perciquois n°1, le petit périodique municipal de Percey.

Extrait du Perciquois n°1


"Bingo" (fût-il le cri de guerre de l'équipe en charge d'étudier l'identité de Chéu ?), "nous le tenons ce fameux seigneur !"
Se sont-ils dit : "Les Chéutains ne sont pas des citoyens exigeants, ça suffira bien, nous avons déjà beaucoup travaillé. Fermons ce recueil" ?
Tout porte à croire que l'enquête s'est arrêtée à ce stade.
Le joli petit damier bleu et blanc plaisait bien. Oh pardon, "le chef échiqueté d'argent et d'azur", soyons héraldiquement correct !


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Creusons maintenant :

Mais quelle est cette famille au cri de guerre si terrifiant ?
Une petite visite sur internet, quelques mots clés dans un moteur de recherche et la famille surgit, presque complète.

Et que trouvons nous page 19 ?  Un seigneur de Percey : Louis-Joseph d'Ailly né le 28/10/1735 à Paris, décédé à 58 ans le 10/07/1794 à Paris, la tête tranchée par la machine infernale de Monsieur Guillotin.
Marié en 1774 avec Anne-Bonne Geneviève Le Camus née le 23/08/1756, décédée le 28/07/1787 à l'approche de ses 31 ans.


Extrait de la famille d'AILLY - Louis Joseph

Un sacré curriculum vitae ce Louis-Joseph.
Oui, mais pas de trace de Chéu !
Père, mère et ascendants ne semblent pas avoir de lien, ni avec Percey, ni avec Chéu et Butteaux.
Idem pour les autres branches.
Restons zen !
Et si c'était dame Le Camus qui avait doté ces terres lors de son union avec Louis-Joseph ?

En parcourant le livre "Histoire de l'abbaye de Pontigny, ordre de Citeaux" écrit par Vaast Barthélemy Henry, publié en 1839, nous apprenons effectivement qu'une dame Le Camus avait succédé aux anciens seigneurs de Chéu en 1750.
C'est vague mais ça donne une piste pour d'autres fouilles sur la toile.

Nous découvrons en cette occasion les noms d'autres personnalités liées à Chéu, comme par exemple l'abbé Gaucher Dignon qui deviendra régisseur de l'abbaye St Germain à Auxerre.


Extrait de l'histoire de l'abbaye de Pontigny, page 273

Le Perciquois n°15 (page 16), calé sur les archives de l'Yonne, confirme cette version : des terres vendues par le sieur Antoine de Buffevent (fils de Charles Antoine de Buffevent (?/1686) et de Geneviève Françoise de Beaujeu (1657/1737) décédée au château de la Tuilerie (Jaulges), et frère cadet de René de Buffevent (1683/1730) ), aux Le Camus.

Extrait du Perciquois n°15


A ce stade, il est imaginable que les autres lieux cités englobent des terres à Chéu.

A remarquer aussi que la date de 1750 donnée par l'abbé Henry n'est pas correcte puisque dame Le Camus n'était pas encore née. Elle héritera de l'ancienne seigneurie des Buffevent au décès de son père (7/01/1767), à l'age de 11 ans. Erreur de retranscription ?

L'article de l'Yonne Républicaine précise : "pour créer un blason, une commune doit s'appuyer sur une famille l'ayant habitée", ce qui n'est pas faux mais pas totalement vrai.

Le  vade-mecum pour un blason communal est plus précis sur le sujet :

Extrait du vade-mecum, page/chapitre 5

A défaut de porter le nom du territoire de la commune, Louis-Joseph ne semble pas avoir eu droit de justice sur les fiefs de Chéu, aucun document ne l'atteste.
A savoir aussi que pendant cette période du 18ème siècle, de nombreux membres d'autres familles sont nés, se sont mariés et ont été inhumés à Chéu. A la fin de ce siècle, les terres de Chéu étaient semble-t-il, fortement divisées entre plusieurs familles.

Piochons prochainement, afin de trouver une famille qui aurait eu une empreinte bien plus importante sur le village et ainsi donner suite à cette fabuleuse histoire du blason de Chéu.
Plusieurs pistes sont à explorer, l'une d'entre d'elles semble plus marquée que les autres.

A bientôt, pour la suite.


Sources : 
Yonne Républicaine
Base de données Carthage
L'Armorial historique de l'Yonne d'Aristide DEY
Les périodiques municipaux de Percey
Le site Racine et Histoire
L'Histoire de l'abbaye de Pontigny, ordre de Citeaux de Vaast Barthélemy Henry
Le vade-mecum pour un blason communal, ministère de la culture
Les archives départementales (BMS)



4 janvier 2020

Le calendrier


La nouvelle année vient de débuter et l'hiver n'a toujours pas recouvert le village d'un épais manteau blanc.
Chez Madame Lucienne, le feu crépite dans la cheminée et diffuse une agréable chaleur dans une maison sobrement décorée.
La nuit tombe. Madame Lucienne prépare le repas, le père Lulu est assoupi dans son fauteuil, un livre en vrac sur les genoux et leurs petits enfants sont occupés à jouer sur le canapé. Lucas se démène comme un beau diable pour détruire un dragon égaré dans un jeu vidéo et Lucie, aux anges, bichonne une poupée.
Subitement son regard est attiré par un livret posé sur la table du salon.
Curieuse, elle pose sa poupée, se saisit des feuillets et observe la photo.

Page de garde du calendrier 2020

"Mamy"
Mamy : "Oui Lucie"
Lucie : "Dis-moi Mamy, c'est le village d'ici en photo ?"
Mamy s’assoit à coté de Lucie : "Oui, c'est une photo aérienne du village"
Lucie : "Ah d'accord. Elle est où ta maison ?"
Mamy : "Et si tu essayais de la trouver"
Lucas, maître du dragon  : "Je me marre. Elle se perd déjà dans ton jardin, elle n'est pas près de trouver"
Mamy : "Laisse la chercher, Lucas s'il te plaît"
Lucie : "Je chercherai plus tard quand Lucas me laissera tranquille", et elle tourne la page, "Oh, mais c'est un calendrier !"
Lucie : "C'est quoi un 1er quartier ?"


Légende du calendrier


Mamy : "Réveillons Papy, il saura nous expliquer"
Lucas malicieux : "J'y vais, j'y cours"
Mamy : "En douceur s'il te plaît"
Lucas se rapproche de Lulu et lui chatouille avec insistance une narine.
Lulu grogne trois fois, ouvre les yeux, se gratouille le nez et demande à Lucas : "Quelle heure est-il ?"
Lucas : "L'heure de nous expliquer la lune"
Mamy, d'une voix haute : "Peux-tu venir expliquer aux enfants les différentes phases de la lune ?"
Lulu se lève, s'approche et prend le calendrier que Lucie lui tend, le regarde et fait la grimace.
"Rien de tel qu'un petit dessin pour expliquer les symboles", dit-il.


Le dessin de Lulu (à lire dans le sens inverse des aiguilles d'une montre)

Lucas : "Dans la légende, ils semblent confondre quartier avec croissant ?"
Lulu : "Oui, ils se sont trompés dans les symboles et le pire, ils ont confondu premier avec dernier. Et il n'y a pas de phénomène marquant les 13, 20 et 26 janvier"

Janvier, à la mode de Chéu

Mamy : "Houlala, ça commence mal"
Lucas, en rire : "J'espère que ce n'est pas pareil avec les poubelles"
Mamy : "Pas question de vérifier tout le calendrier, il va finir dans la cheminée"
Papy : "D'accord mais juste le temps de vous expliquer une méthode facile pour se rappeler les symboles"
"Imaginez une barre verticale qui passe au milieu de la lune"
Lucie trace un trait imaginaire.
"Si, avec la partie éclairée, en jaune dans le dessin, vous voyez un "p", c'est que la lune est dans son premier quartier ou en phase croissante"
"Si au contraire, vous voyez un "d", c'est que la lune est dans son dernier quartier ou en phase décroissante"
Lucie reste bouche bée.
Lucas : "C'est simple expliqué ainsi !"
Lucie : "Pas pour tout le monde !"
Lucas : "Tu parles pour toi ?"
Lucie : "Non, non ...pour ceux qui font le calendrier"
Mamy : "Vous remarquerez aussi que le maire profite du calendrier pour faire campagne"
Lulu : "C'est vrai que ce calendrier truffé d'erreurs a un relent de propagande. Les photos sont bien ciblées avec des enfants et des personnes âgées, tout en étant de mauvaise qualité, l'agenda post-électoral est déjà bien établi..."
Mamy : "Et cette place, toujours cette place comme si le village n'était qu'une place"
Lulu : "La folie des grandeurs, que veux-tu !"
Mamy : "En tout cas, il ne dit pas combien ça coûte réellement"
Lulu : "Surtout pas maintenant, il perdrait bien trop d’électeurs"

Mamy : "Bon, et si on passait à table, c'est cuit, ... archi-cuit"
Lulu : "Tu parles du repas ou des travaux ?" 
Lucas : "De toutes façons, ce papier, cette encre, vont finir dans les poubelles pour ceux qui n'ont pas de cheminée"

Toute la famille passe à table et le calendrier s'enflamme.


Notes :
Tous les personnages sont fictifs.
Le calendrier est bien réel.


Pour information : les phases principales de la lune pour le 1er trimestre 2020